Financer son achat

Devenir propriétaire au Québec représente souvent l’investissement le plus important d’une vie. Si trouver la maison ou le condo idéal constitue une étape excitante, le financement de cet achat soulève de nombreuses questions : combien emprunter, auprès de qui, et comment s’assurer d’obtenir les meilleures conditions? Contrairement aux idées reçues, le financement immobilier ne se résume pas à un simple prêt bancaire.

Ce processus implique une compréhension précise de votre capacité financière, une connaissance des différents produits hypothécaires disponibles, et une maîtrise des nombreux frais connexes. Que vous soyez acheteur d’une première propriété ou investisseur chevronné, cette ressource vous accompagne à travers les fondamentaux du financement immobilier québécois, des critères d’admissibilité jusqu’aux stratégies pour optimiser votre dossier.

Évaluer votre capacité d’emprunt réelle

Avant même de visiter votre première propriété, comprendre précisément combien vous pouvez emprunter vous évitera bien des déceptions. Les institutions financières québécoises utilisent des critères stricts pour déterminer votre admissibilité.

La mise de fonds minimale requise

Au Canada, la mise de fonds minimale varie selon le prix d’achat de la propriété. Pour un bien de moins de 500 000 $, vous devez fournir au minimum 5 % du prix d’achat. Entre 500 000 $ et 999 999 $, c’est 5 % sur la première tranche de 500 000 $ et 10 % sur le montant excédentaire. Pour toute propriété d’un million de dollars ou plus, la mise de fonds minimale grimpe à 20 %.

Si votre mise de fonds est inférieure à 20 %, vous devrez obligatoirement souscrire à une assurance prêt hypothécaire auprès de la SCHL (Société canadienne d’hypothèques et de logement) ou d’un assureur privé comme Sagen ou Canada Guaranty. Cette assurance protège le prêteur en cas de défaut de paiement, mais représente un coût additionnel qui s’ajoute généralement à votre prêt.

Les ratios d’endettement à respecter

Les prêteurs évaluent votre capacité de remboursement à l’aide de deux ratios clés. Le ratio d’amortissement brut de la dette (ABD) ne devrait pas dépasser 32 % de votre revenu brut mensuel. Ce ratio inclut vos paiements hypothécaires, les taxes foncières et municipales, les frais de chauffage et 50 % des charges de copropriété si applicable.

Le ratio d’amortissement total de la dette (ATD), quant à lui, ne doit généralement pas excéder 40 % de votre revenu brut. Il englobe l’ABD plus toutes vos autres dettes : prêts auto, cartes de crédit, prêts étudiants et autres obligations financières. Un couple gagnant 80 000 $ annuellement pourrait donc consacrer au maximum 2 667 $ par mois à l’ensemble de ses dettes.

Les types de prêts hypothécaires disponibles

Le marché québécois offre une diversité de produits hypothécaires, chacun avec ses avantages selon votre situation financière et vos objectifs à long terme.

Taux fixe ou taux variable

Le prêt à taux fixe vous garantit un taux d’intérêt constant pour toute la durée de votre terme, généralement de 1 à 10 ans. Cette option offre une prévisibilité budgétaire totale : vos versements hypothécaires restent identiques, peu importe les fluctuations du marché. C’est la formule privilégiée par ceux qui recherchent la stabilité et qui anticipent une hausse des taux.

Le prêt à taux variable fluctue selon le taux préférentiel de votre institution financière, lui-même influencé par le taux directeur de la Banque du Canada. Historiquement, cette option s’avère souvent moins coûteuse à long terme, mais elle comporte un risque : vos paiements peuvent augmenter si les taux grimpent. Certains prêts variables offrent toutefois des paiements fixes, seule la portion capital-intérêts variant.

Prêt fermé, ouvert ou convertible

Un prêt fermé offre généralement les meilleurs taux, mais impose des pénalités importantes si vous souhaitez rembourser votre hypothèque avant la fin du terme. Ces pénalités peuvent atteindre trois mois d’intérêt ou le différentiel de taux d’intérêt, selon le montant le plus élevé.

Le prêt ouvert vous permet de rembourser en tout ou en partie sans pénalité, offrant une flexibilité maximale. Cette liberté se paie cependant par un taux d’intérêt significativement plus élevé. Enfin, le prêt convertible combine les deux : vous commencez avec un prêt ouvert à court terme, puis le convertissez en prêt fermé lorsque les conditions vous conviennent.

L’importance de la préapprobation hypothécaire

Obtenir une préapprobation hypothécaire devrait être votre première démarche sérieuse avant de commencer vos recherches. Ce processus, gratuit dans la plupart des institutions, vous indique le montant maximal que vous pouvez emprunter et garantit un taux d’intérêt pour une période déterminée, généralement de 90 à 120 jours.

Au-delà de connaître votre budget, la préapprobation renforce considérablement votre position de négociation. Dans un marché compétitif, un vendeur privilégiera souvent une offre d’achat accompagnée d’une préapprobation plutôt qu’une offre conditionnelle au financement. Cela démontre votre sérieux et votre capacité réelle d’acheter.

Pour obtenir votre préapprobation, préparez vos documents : talons de paie récents, avis de cotisation des deux dernières années, relevés bancaires et informations sur vos dettes actuelles. Les travailleurs autonomes devront fournir leurs états financiers et parfois leurs déclarations de revenus des trois dernières années. Le prêteur vérifiera également votre cote de crédit : un score supérieur à 680 facilite grandement l’approbation et l’accès aux meilleurs taux.

Les programmes d’aide pour faciliter l’accession

Plusieurs programmes gouvernementaux et incitatifs fiscaux peuvent alléger le fardeau financier de votre premier achat immobilier au Québec.

Le régime d’accession à la propriété (RAP)

Le RAP permet aux premiers acheteurs de retirer jusqu’à 35 000 $ de leur REER sans payer d’impôt, à condition de rembourser cette somme dans les 15 ans. Un couple pourrait donc mobiliser jusqu’à 70 000 $ pour leur mise de fonds. Pour être admissible, vous ne devez pas avoir été propriétaire d’une habitation au cours des quatre dernières années et devez occuper la propriété comme résidence principale.

Cette stratégie comporte un double avantage : elle vous permet d’accumuler votre mise de fonds à l’abri de l’impôt dans les années précédant l’achat, tout en réduisant votre revenu imposable grâce aux cotisations REER. Toutefois, assurez-vous de pouvoir respecter le calendrier de remboursement pour éviter que les montants non remboursés soient ajoutés à votre revenu imposable.

Le crédit d’impôt pour l’achat d’une première habitation

Ce crédit d’impôt fédéral non remboursable permet aux premiers acheteurs de récupérer jusqu’à 1 500 $ sur leur déclaration de revenus. Bien que modeste, ce montant peut couvrir une partie des frais de notaire ou d’inspection. Les mêmes critères d’admissibilité que le RAP s’appliquent généralement.

Comprendre les coûts annexes au financement

L’erreur classique des premiers acheteurs consiste à ne budgéter que pour la mise de fonds et les versements hypothécaires. Pourtant, plusieurs frais substantiels s’ajoutent lors de l’acquisition.

Les frais de notaire représentent généralement entre 1 000 $ et 2 000 $ au Québec. Ces honoraires couvrent la vérification des titres de propriété, la rédaction de l’acte de vente et l’enregistrement auprès du Registre foncier. À cela s’ajoutent les droits de mutation, communément appelés « taxe de bienvenue », calculés selon un pourcentage progressif du prix d’achat. Pour une propriété de 300 000 $, comptez environ 3 000 $ de droits de mutation.

L’inspection préachat, bien que non obligatoire, constitue un investissement prudent de 400 $ à 700 $ qui peut vous éviter des milliers de dollars en réparations imprévues. Si votre mise de fonds est inférieure à 20 %, la prime d’assurance hypothécaire varie de 0,6 % à 4 % du montant du prêt selon le ratio prêt-valeur. Enfin, prévoyez entre 1 000 $ et 3 000 $ pour les frais de déménagement et les branchements de services.

Choisir le bon prêteur et négocier efficacement

Contrairement à la croyance populaire, vous n’êtes pas limité à votre institution bancaire habituelle. Le marché hypothécaire québécois regroupe des banques à charte, des caisses populaires, des coopératives de crédit, des compagnies d’assurance et des prêteurs hypothécaires spécialisés.

Faire appel à un courtier hypothécaire peut vous faire économiser temps et argent. Ces professionnels ont accès à de nombreux prêteurs et peuvent comparer simultanément des dizaines d’offres. Leur rémunération provient généralement des institutions financières, rendant leurs services gratuits pour vous. Ils s’avèrent particulièrement utiles pour les travailleurs autonomes ou ceux avec des situations financières atypiques.

Lors de vos négociations, ne vous focalisez pas uniquement sur le taux d’intérêt. Examinez attentivement les privilèges de remboursement anticipé : certains prêteurs autorisent des paiements supplémentaires annuels de 10 % à 20 % du montant initial sans pénalité. Vérifiez également la portabilité de l’hypothèque si vous prévoyez déménager avant la fin du terme, ainsi que la possibilité d’augmenter vos versements périodiques pour accélérer le remboursement.

Financer un achat immobilier représente une démarche complexe qui mérite réflexion et préparation minutieuse. En comprenant votre capacité d’emprunt, en explorant les différents produits disponibles et en maximisant les programmes d’aide, vous vous positionnez avantageusement pour concrétiser votre projet dans les meilleures conditions. N’hésitez pas à consulter plusieurs professionnels et à prendre le temps nécessaire pour comparer vos options avant de vous engager sur plusieurs décennies.

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